LA CONVENTION CITOYENNE POUR LE CLIMAT

Après 8 mois de travail, les 150 citoyens tirés au sort pour trouver des solutions à la crise climatique ont débattu le week-end dernier et adopté l’intégralité des mesures qu’ils souhaitent transmettre au gouvernement. Ils ont aussi précisé celles qu’ils veulent proposer pour un référendum, dont le crime d'"écocide".  En matière agricole, les propositions sont déconnectées de la réalité du terrain et dépourvues de la moindre approche économique.  Comme l'AGPB le rappelle sans cesse, la transition agro-écologique oui, mais pourvu qu'elle soit accompagnée et soutenable économiquement et techniquement pour les agriculteurs. 

LA CONVENTION CITOYENNE, UNE VOLONTE DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE APRES L’EPISODE DES GILETS JAUNES ET DU GRAND DEBAT

Après 8 mois de travail, les 150 citoyens tirés au sort pour trouver des solutions à la crise climatique ont débattu le week-end dernier et adopté l’intégralité des mesures (moins une : « réduire le temps de travail sans perte de salaire) qu’ils souhaitent transmettre au gouvernement et préciser celles qu’ils veulent proposer pour un référendum. Ici, vous sont présentées les propositions qui seront soumises au vote de la Convention concernant l’agriculture et l’alimentation. Beaucoup avait déjà fait l’objet de débats lors des EGA. Mais, les citoyens veulent aller plus loin que ce qui avait été retenu alors.

Le processus de vote mis en place par le comité de gouvernance a été fortement contesté par les citoyens : ils ont eu à voter par famille d’objectifs et non mesure par mesure. Le rapport final, adopté a été remis à Élisabeth Borne, venue clôturer les travaux.

Les 150 citoyens se sont également prononcés pour un référendum resserré portant seulement sur l’introduction des notions de « préservation de l’environnement » et de « lutte contre le dérèglement climatique », dans le préambule et l’article 1 de la Constitution, ainsi que l’introduction dans le droit français d’un crime d’ « écocide » (pour mémoire, cette mesure avait été rejetée par l’Assemblée nationale car elle inquiète les entreprises et fait déjà débat sur le plan juridique).

LES MESURES DE LA CONVENTION CITOYENNE CONCERNANT L’AGRICULTURE

  • Engrais azotés : augmenter la TGAP
  • Diminuer de 50 % l’usage des phytos d’ici à 2025
  • Interdiction des pesticides les plus toxiques en 2035 : Sont concernés les CMR ainsi que les pesticides les plus dommageables pour l’environnement.
  • Structurer la filière des protéagineux : Inscrire dans la loi et le PSN l’augmentation de l’autonomie du cheptel animal français, l’atteinte de 100% d’autonomie pour l’alimentation humaine en protéines végétales, l’accroissement de la diversification des cultures dans la PAC, la mise en œuvre du Plan Protéines Végétales national
  • Rendre les élevages plus agro-écologiques : Interdire le financement d’implantation de nouveaux élevages qui ne respectent pas les conditions d’agro-écologie et de faibles émissions de GES, accompagner les éleveurs vers une restructuration de leurs cheptels pour améliorer la qualité de production.
  • Tenir une position ambitieuse de la France pour la négociation de la PAC : relever les niveaux d’exigences des conditions de verdissement. Transformer l’attribution des aides à l’hectare vers des aides à l’actif agricole.
  • Evaluer la performance climat du PSN : Mettre en place un mécanisme de suivi et d’évaluation de l’atteinte de la performance climat du PSN
  • Mieux préserver les espaces agricoles périurbains : La Convention veut protéger fermement et définitivement les espaces naturels, les espaces agricoles périurbains et les forêts périurbaines. Elle veut notamment s’assurer de la création de ceintures maraichères autour des pôles urbains
  • Limiter davantage l’artificialisaton des terres : Interdire toute artificialisation des terres tant que des réhabilitations ou friches commerciales, artisanales ou industrielles sont possibles dans l’enveloppe urbaine existante.
  • Prendre en compte les stratégies nationales à caractère environnemental dans le PSN : Mettre en compatibilité le PSN avec la SNBC, la Stratégie nationale pour la biodiversité, le Plan national santé environnement, la Stratégie nationale de lutte contre la déforestation Importée (SNDI). Intégrer toutes les dispositions concernant le développement de l'agroécologie au PSN.
  • Soutenir les prairies permanentes et les couverts végétaux : Inscrire dans la loi et le PSN l’aide au maintien des prairies permanentes, la mise en place d’un couvert végétal obligatoire, la rémunération des services environnementaux rendus par les agriculteurs.
  • Renégocier le CETA au niveau européen pour y intégrer les objectifs climatiques de l’accord de Paris : les citoyens demande à ce que la France notifie officiellement sa décision définitive de ne pas ratifier le CETA en l’état et qu'elle dénonce l’application provisoire de l’accord.
  • Contrôler la mise en œuvre de la loi EGalim : Mettre en place un organisme de contrôle pour assurer la bonne mise en œuvre de la loi EGalim.

QUELQUES PROPOSITIONS CONCERNANT L’ALIMENTATION

  • Favoriser les produits issus de circuits courts dans les achats publics : Utiliser le levier de la commande publique pour valoriser les produits issus de circuits courts, locaux et à faible coût environnemental, sous la forme d’un “guide d’achat” à adresser aux acheteurs publics
  • Développer l’agriculture biologique dans le PSN : Il s’agit d’inscrire le développement de l’agriculture biologique dans la loi et le PSN : maintenir l’aide à la conversion, restaurer l’aide au maintien de l’agriculture biologique, faire supporter le coût de certification annuelle du label par l’Etat ;
  • Supprimer les labels privés et créer un label agro-écologie
  • Informer sur le degré de transformation des produits : Etiquetage obligatoire et mise en place d’une charte éthique agroalimentaire qui renseigne et qualifie en termes de gaz à effet serre les auxiliaires technologiques et les additifs alimentaires.
  • Interdire l’importation des produits composés d’auxiliaires technologiques interdits dans l’UE
  • Faire disparaître les auxiliaires de production et des additifs alimentaires sous 5 ans.
  • Taxer les produits-ultra transformés à forte empreinte carbone et faible apport nutritionnel : Le Comité propose soit la taxation des producteurs via création d’une contribution indirecte sur ces produits, soit un mix entre hausse de la TVA et taxe sur la production.
  • Créer des chèques alimentaires pour acheter des produits en circuits courts ou bio
  • Favoriser le développement les emballages biosourcés compostables
  • Proposer plus de plats végétariens en restauration collective publique : Passer à un choix végétarien quotidien dans les self-services à partir de 2022 et inciter la restauration collective à menu unique à développer des menus végétariens.

UN CALENDRIER QUI S’ACCELERE POUR RELANCER LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE D’ICI LA FIN DU QUINQUENNAT

Le calendrier de la présentation des conclusions de la Convention citoyenne pour le climat, le lundi 29 juin, au Président de la République coïncide avec les municipales, le très probable remaniement ainsi que les propositions formulées par les Présidents du Sénat, de l’Assemblée nationale et du Conseil économique, social et environnemental, attendues autour du 1er juillet. Un calendrier qui s’accélère alors que le Président de la République a promis de dévoiler « le nouveau chemin » qu’il entend faire prendre à la France d’ici à Mai 2022.

Les prochaines échéances :

  • Dans une tribune publiée le 22 juin dans le quotidien Le Monde, 256 députés de la majorité (nationaux et européens), sous l’égide de l'eurodéputé Pascal Canfin, ont estimé que les propositions de la CC «devront être écoutées et largement mises en œuvre, à travers les lois votées au Parlement, à travers notre mobilisation en Europe lorsque la compétence se situe à cet échelon». Selon eux, ce projet devra être adossé à un référendum « à choix multiples pour garantir que la majorité des Français soutienne cette ambition ».
  • 24 juin, Richard Ferrand, Président de l’Assemblée nationale a réuni société civile et opposition pour préparer sa contribution pour le Président de la République – Un colloque à huis clos « Dialoguer pour agir », dans le cadre de la mission qu’il lui a confiée a ainsi été organisé. Il a réuni une quinzaine d’élus locaux, une quinzaine d’experts, autant de représentants syndicaux, responsables associatifs et « citoyens » membres de la Convention citoyenne. Deux députés par groupe parlementaire ont également été invités. Au total, une centaine de personnes ont été réparties en quatre ateliers thématiques : relations entre État et collectivités, souveraineté, environnement et transition, économie et emploi.
  • 25 juin, à l’AN - Audition de représentants de la Convention citoyenne par les Commissions des Affaires Economiques et du développement durable.
  • 29 juin, le Président de la République rencontrera les 150 citoyens de la CC et devrait apporter des premières réponses à leurs propositions. Ces derniers devraient ensuite présenter leur « réponse à la réponse » du gouvernement, à la rentrée. Ils viennent par ailleurs de créer une association, « Les 150 », dédiée au suivi de leurs propositions. 

QUELQUES REACTIONS DU MONDE POLITIQUE SUR LES PROPOSITIONS EN MATIERE D’AGRICULTURE

  • Julien Dive (Aisne, LR) résume le sentiment général parmi les professionnels du secteur : « la transition vers une agriculture durable ne peut pas se faire du jour au lendemain ». Et de regretter que l’accompagnement pour parvenir à une agriculture plus durable ait été si faiblement travaillé par les citoyens.
  • Jean-Baptiste Moreau (Creuse, LREM) : « Les résultats sont déconnectés de l’agriculture et très en phase avec la vision urbaine développée dans les médias et par les ONG ». Il subodore un mauvais amalgame entre une agriculture mondialisée aux pratiques qu’il « est bien de dénoncer », et le modèle français. S’agissant de l’utilisation des produits phytosanitaires, « bien sûr que sur le fond, je suis favorable à la réduction ». Cependant, il doute que l’idée colle avec la mission première des travaux de la Convention, qui est de réduire les émissions de GES. « Car qui dit retour au passage mécanique, dit forcément augmentation des émissions ».
  • Jean-Marie Sermier (Jura, LR / VP de la commission du Développement durable et viticulteur) constate aussi que les mesures sur lesquelles il n’est pas d’accord « viennent quasiment mot pour mot d’un certain nombre d’ONG environnementales ». Sur l’agriculture biologique, il prévient : « 50 % des surfaces, c’est irréaliste. Verser dans le tout bio par philosophie serait le contraire d’une avancée. » S’il ne remet pas en question l’envie « d’avoir une agriculture saine », Jean-Marie Sermier déclare « que la France est aujourd’hui le producteur de biens alimentaires le plus fiable au monde et le plus propre ».
  • Dominique Potier (Meurthe-et-Moselle, PS) est agréablement surpris par l’intérêt des citoyens pour une révision de la politique commerciale, et notamment leur volonté de tourner le dos au CETA afin « d’encourager une alimentation saine et une agriculture faible en émissions de gaz à effet de serre ».
randomness