Les étrennes du Gouvernement au monde agricole

En plein confinement et la même semaine que la parution des comptes de l’agriculture qui constate la chute de 7,9% du résultat brut de la branche agricole (voir communiqué de presse FNSEA) il est proposé de « sortir du glyphosate » grâce à un crédit d’impôt de 2500€ et la mise en place d’un plan pollinisateur prévoyant la refonte de l’arrêté abeille de 2003.

 

Le « en même temps » continue au plus haut sommet de l’Etat. D’un côté, le gouvernement lance son plan de relance pour « reconquérir la souveraineté alimentaire de la France » et de l’autre, il ajoute des contraintes supplémentaires sur les agriculteurs.

 

Sur le glyphosate, le tweet du 25 novembre 2017 du Président de la République qui annonçait la fin du glyphosate dans les trois ans, fera date. Aujourd’hui, le constat est bien là : la France renonce à faire cavalier seul car trop d’impasses sont identifiées. Que ce soit dans le rapport de l’INRAE (en grandes cultures) ou dans le dernier rapport de la mission d’information parlementaire sur le suivi de la stratégie de sortie du glyphosate, son interdiction entrainerait des surcoûts pour les agriculteurs et engendrerait des impasses techniques. Les rapporteurs ont ainsi préconisé le 15 décembre dernier « d'améliorer encore la remontée des données sur l'utilisation du glyphosate, d'accroître le soutien aux agriculteurs et d'inscrire la sortie du glyphosate dans une démarche européenne ». Il est donc indispensable d’avoir une approche communautaire pour éviter les distorsions de concurrence entre pays. Il en va de même sur le plan pollinisateur.

 

Ce nouveau plan doit pouvoir répondre aux différents facteurs de risques pour les pollinisateurs, à savoir les risques alimentaires, sanitaires, climatiques et phytosanitaires. Il faut une approche globale sur le territoire et ne pas s’enfermer uniquement sur la question des traitements de produits en opposant les agriculteurs et les apiculteurs. De nombreuses actions complémentaires existent : maintien de la diversité des cultures, valorisation des espaces non productifs attractifs pour les pollinisateurs et l’adoption de bonnes pratiques. Depuis plusieurs semaines, le gouvernement souhaite à la fois proposer un plan pollinisateur et la révision de l’arrêté de 2003 sur la « mention abeille ». Le calendrier est extrêmement restreint puisque les ministères veulent une mise en consultation de l’arrêté Abeilles et du Plan pollinisateurs à partir du 23 décembre, pour une sortie des textes au premier trimestre 2021, sans qu’aucune étude d’impacts n’ait été réalisée.

Ce n’est pas acceptable car le nouvel arrêté interdit l’utilisation de l’ensemble des produits sous réserve de la « mention abeille » ayant de nombreuses conséquences pour l’ensemble des filières :

•             Agronomiques : chaque produit doit être appliqué dans des conditions de température et d’humidité qui lui sont propres afin d’avoir une efficacité optimale. Ainsi proposer un traitement uniquement après le coucher du soleil est un non-sens agronomique, certains traitements doivent se faire de préférence le matin avant le lever du soleil. Imposer un horaire identique à tous les produits remet totalement en question le bienfondé de la recherche et du développement autour des produits phytopharmaceutiques.

•             Techniques : le délai des 3 heures après le coucher du soleil pour effectuer les travaux est très insuffisant. En effet, les traitements phytosanitaires doivent être fait au bon moment afin d’être efficaces. Dans ce cas, nombre d’agriculteurs se verraient contraints d’engager une course contre la montre dans l’espoir de protéger convenablement toutes leurs cultures. De plus, utiliser uniquement les produits portant la mention « abeilles », s’il en existe, réduit considérablement le nombre de produits autorisés entrainant ainsi l’apparition de résistances d’année en année.

•             Economiques : l’ajout de la mention « abeilles » sur un produit phytosanitaire demande des tests supplémentaires. Ces tests ont évidemment un coût pour les fabricants entrainant de réelles impasses pour certaines cultures qui n’auront plus la possibilité d’utiliser de produits. Ces coûts vont inévitablement être payés par les exploitants eux-mêmes qui ne verront pas pour autant le prix d’achat de leurs productions augmenter.

•             Sociétales : nous pouvons le constater tous les jours, les traitements de nuit sont mal perçus par le voisinage. Cette mesure risque d’engendrer encore plus de tension entre les agriculteurs et certains riverains. Mais les traitements de nuit sont surtout dangereux pour les agriculteurs eux-mêmes.

L’interdiction de ces produits entrainera la suppression progressive de cultures sans solutions de traitements, la diminution de l’offre alimentaire pour les pollinisateurs et la création de période de disette etc. Tout l’inverse de l’objectif du plan pollinisateur !

Nous demandons le report de la consultation et prônons la co-construction.

Un vœu pour la nouvelle année : dialogue et pragmatisme !

 

 

 

 

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