DISCOURS DE PHILIPPE PINTA AU COLLOQUE IRIS AGPB DU 3 NOVEMBRE

COLLOQUE IRIS AGPB - CLIMAT AGRICULTURE ET SECURITE ALIMENTAIRE

Allocution d'ouverture de Philippe PINTA, Président de l’AGPB - 3 novembre 2016

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Je vous souhaite à mon tour la bienvenue à ce colloque conçu conjointement par l’IRIS et par les Céréaliers de France, l’AGPB sur ce thème du  Climat, de l’Agriculture et de la Sécurité Alimentaire, un sujet d’une grande actualité alors que certains pouvaient le croire d’un autre âge.

Merci cher Pascal Boniface de nous accueillir dans ce lieu qui est le vôtre, pour aborder ce thème, alors même que s’ouvre dans quelques jours à Marrakech la nouvelle conférence sur le climat, la COP  22, après que sa dernière édition la COP 21 s’est tenue ici à Paris l’an passé.

Que l’agriculture dépende du climat, nul ne l’ignore et nous céréaliers français  en avons fait la dure expérience cette année. Des phénomènes climatiques sans précédent dans cette zone tempérée réputée stable,  ont conduit cet été à une moisson désastreuse, inférieure de plus de 30% à la normale. Nos partenaires Marocains situés en zone plus aride connaissent bien mieux ces phénomènes encore, avec des fluctuations interannuelles de production plus importantes et qui structurent les politiques initiées pour l’agriculture et l’alimentation tel le plan Maroc vert initié par sa Majesté le roi Mohammed VI.

Depuis la plus haute antiquité, les agriculteurs ont inventé des solutions audacieuses pour parer aux caprices du climat et s’assurer d’une récolte suffisante et stable pour nourrir les populations en toutes circonstances. La plus connue et la plus largement répandue est bien sûr l’irrigation dont notre pays serait bien inspiré de reprendre les fondamentaux. La sélection génétique est depuis l’origine un autre axe majeur avec des variétés désormais plus résistantes et plus résilientes aux fluctuations climatiques. Des solutions sophistiquées existent désormais qui font appel à l’imagerie satellite, aux techniques de l’information qui sont à la base d’outils d’aide à la décision, aisément accessibles aux agriculteurs.

Car face au réchauffement climatique et plus encore face à l’accentuation des phénomènes climatiques extrêmes, nous ne sommes pas complètement démunis. Il existe des réponses et notre capacité d’adaptation est importante, à condition de bien faire appel à la recherche et à l’innovation technique qui ouvrent aujourd’hui des perspectives immenses, sous réserve de ne pas être bridés d’entrée de jeu par des réglementations passéistes qui ne prennent pas en compte la nouvelle donne. Or c »est parfois le cas de l’Europe  et de la France.

C’est à cette condition que nous pourrons véritablement faire face au défi de notre génération : nourrir d’ici 2050 une population de 9 milliards d’individus, urbaine pour l’essentiel, dont les exigences alimentaires sont complètement nouvelles. Pour cela il faudra doubler la production alimentaire mondiale. Toutes les régions du monde seront appelées à y contribuer, pays en développement comme pays développés. Y compris donc cette zone qui est la nôtre, en Europe de l’Ouest et en France, exceptionnelle par ses caractéristiques pedo-climatiques. Mais ce projet mérite de se développer dans le cadre d’un partenariat Nord-Sud et pour ce qui nous concerne, avec nos partenaires et voisins sur l’autre rive de la Méditerranée. Un enjeu géostratégique s’il en est.

Mais les discussions  lors de la COP 21 ont aussi conduit à une prise de conscience nouvelle : cette agriculture, souvent citée pour ses émissions de gaz à effet de serre, en particulier pour  l’élevage ruminant, cette agriculture donc, loin d’être un problème est aussi et sans doute d’abord une solution pour atténuer les effets dudit changement climatique. S’agissant en particulier des céréales, il a ainsi été mis en évidence que l’agriculture agissait comme une gigantesque pompe à carbone,  prélevant le gaz carbonique de l’air, ce principal gaz à effet de serre, pour en produire l’alimentation des hommes. Et plus encore, l’agriculture performante que nous pratiquons, loin d’être une source d’émission, était d’abord une source de stockage de carbone dans les sols.  Ainsi, plus les rendements sont élevés, et ils sont en moyenne élevés dans notre pays,  plus cet effet bénéfique est important. Nul n’avait véritablement conscience de cela.

Il y a là certainement sujets à débats. Mais ce qui est certain, c’est que l’agriculture est bien au cœur d’un enjeu majeur pour les années futures. Par l’influence du climat sur son développement, par sa contribution à la lutte contre le réchauffement climatique, par la solution qu’elle se doit d’apporter au défi alimentaire mondial.

Un livre a été écrit à quatre mains sur ces questions par Sébastien ABIS et Mohamed SADIKI ; il s’intitule du blé par tous les temps et il d’être publié il y a quelques jours. Ces deux regards croisés, posés des deux côtés de la Méditerranée, du Maroc et de la France viennent à point nommé pour éclairer nos débats de ce matin.  

Je nous souhaite donc de fructueuses  discussions et je cède maintenant la place à Hervé MAUREY, Sénateur de l’Eure,  Président de la Commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat.